[Parution] www.lexpress.fr – Voici où le sel se cache dans nos aliments

Des députés veulent inciter le secteur agroalimentaire à mettre moins de sel dans ses produits. Leur liste est longue…

Les députés l’ont bien compris, le sel ne nous veut pas que du bien. Surtout quand il se niche là où on ne s’y attend pas. Un rapport parlementaire sur l’alimentation industrielle, adopté ce mercredi, préconise la réduction de la teneur en sel dans les produits industriels, ainsi qu’une mise en place dans la loi de seuils limite à ne pas dépasser.

Car ce n’est pas la salière, posée au milieu de la table à manger, ou le sel de cuisine, permettant de rehausser le goût d’un plat, qui posent véritablement problème, mais bien la main trop lourde des acteurs de l’agroalimentaire. « Dans de nombreux pays, environ 80% du sel dans l’alimentation provient des aliments transformés », note dans un rapport l’OMS.

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Cet ennemi caché a des effets délétères sur la santé: son excès provoque un risque de maladies cardio-vasculaires, deuxième cause de mortalité en France et d’hypertension artérielle. Aujourd’hui, nous ingérons en moyenne 12 grammes de sel par jour, quand il ne faudrait pas dépasser les 5 grammes, s’alarme l’OMS.

2,5 millions de décès pourraient être évités chaque année

Et ces conséquences sur notre organisme ne sont pas à prendre à la légère. Selon l’Organisation mondiale de la Santé, qui vise une réduction de 30 % de notre consommation d’ici 2025, 2,5 millions de décès pourraient être évités chaque année dans le monde, si la consommation de sel au niveau mondial était ramenée au seuil recommandé.

De nombreux aliments regorgent de ce sel. Pour certains, comme les charcuteries, viandes et poissons fumés ou fromages (la fêta et le roquefort en tête), il faut se rendre à l’évidence. D’autres, telles les soupes en briques, bouillons ou plats préparés proclamés sains sur leurs étiquettes, sont moins attendus.

« Cette semaine, une de mes patientes m’a parlé d’une salade toute prête, qu’elle a consommée. Sur l’étiquette, ce produit, qui comprenait du poisson et de la sauce soja, indiquait contenir 0,9 grammes de sel pour 100 grammes. Mais il y en avait 300 grammes [de salade]! Il ne lui restait donc plus que 2 grammes de sel pour le reste de son alimentation du jour, si l’on s’en tient aux 5 grammes préconisés », explique Isabelle Hendrick, diététicienne nutritionniste.  

Le décompte va vite. On trouve 1 gramme de sel dans une rondelle de saucisson, une poignée de chips, un tiers de sandwich, un bol de soupe, une part de pizza, ou quatre tranches de pain, rappelle dans un message de prévention le ministère de la Santé.

Confitures, compotes, biscuits…

Le pain, très prisé des habitants de l’Hexagone, est d’ailleurs directement dans le viseur du rapport parlementaire. « 30% des apports quotidiens en sel viennent du pain en France » a rappelé auprès de l’AFP Michèle Crouzet, rapporteure de la commission et députée LREM. Le texte réclame la mise en place obligatoire d’une teneur maximale en sel des produits de panification de 18 grammes par kilo de farine. Puis, 16 grammes d’ici 2021.

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Dans d’autres aliments de la vie quotidienne, la présence de sel est moins évidente. « On en trouve aussi dans les céréales du petit-déjeuner, les viennoiseries, les biscuits sucrés, mais aussi dans certaines confitures ou compotes », explique Isabelle Hendrick.

« Chez nous déjà, lorsque l’on cuisine un gâteau, les recettes indiquent souvent d’ajouter une pincée de sel, pour le goût. Mais lorsque les industriels s’en chargent, ils n’en mettent pas qu’une pincée ! Le sel stimule les papilles et donne envie de manger, il peut inciter les consommateurs à doubler les rations et les faire racheter ce produit. Il y a un réel phénomène addictif, les industriels l’ont donc inclus dans leur coût de production », développe la spécialiste.

Le sel, considéré comme un exhausteur de goût, a aussi une fonction de conservation, ce qui en fait le premier des additifs dans l’industrie alimentaire, toujours plus performante pour faire repousser les dates limites de consommation. Et si certaines marques essayent de réduire cette teneur, en le clamant sur leurs étiquettes, le résultat n’est pas encore satisfaisant pour la diététicienne.

Caché dans les étiquettes

« Des produits qui affichent ‘- 25 % de sel’ c’est bien, mais cela ne concerne pas forcément les meilleurs aliments. Il s’agit souvent du jambon qui de base est très riche en nitrates et en sel ». Même si elle est minime, la prise de conscience semble néanmoins être amorcée. En 2015, le secteur de la charcuterie a signé un accord afin de diminuer de 5% le taux moyen en sel et gras de ses produits.

Plus anecdotique, on trouve aussi de fortes quantités de sel dans… les comprimés effervescents. Une étude publiée en 2013 dans le British Medical Journal révélait que consommer huit comprimés de paracétamol par jour équivalait à ingérer huit poignées de chips.

Alors comment réduire ce sel qui nous donne du grain à moudre ? La diététicienne Isabelle Hendrick conseille de cuisiner davantage de produits bruts, et de le remplacer par des épices, des aromates, des herbes, ail, oignons ou échalotes, « pour donner du goût ». Et dans les supermarchés, « il faut apprendre à lire les étiquettes », clame-t-elle.

Mais parfois, là aussi, le sel se dissimule. Selon les marques, il peut prendre diverses identités: sodium, chlorure de sodium, bicarbonate de sodium,nitrate de sodium,alginate de sodium, bisulfate de sodium… Avec des quantités différentes. 1 gramme de sodium ou de chlorure de sodium = 2,5 grammes de sel.

Le gouvernement en faveur du « name and shame »

Déshabituer les Français à manger trop salé devrait encore prendre du temps. Entre 1999 et 2007, « les apports moyens en sel de la population adulte ont diminué en moyenne de 5,2 % », a souligné dans un rapport publié l’an passé par l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation). Une baisse encore insuffisante « pour atteindre à court terme les recommandations », déplore-t-elle.

Et la taxe sur les produits salés, un temps évoquée par les députés de la commission parlementaire, a finalement été balayée par le gouvernement, qui préfère éviter la contrainte. « Je préfère privilégier cette promotion des accords collectifs, en utilisant le ‘name and shame’, ou le ‘name and fame », soit dénoncer publiquement les marques qui ne joueraient pas le jeu, a répondu aux parlementaires la semaine passé le ministre de l’Agriculture Stéphane Travert.

Source : www.lexpress.fr

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